L’ORTF saison 2 ?

Encore une nouvelle réforme pour France Télévisions ?

“Redéfinir une politique de l’audiovisuel public, fusionner France Télévisions et Radio France dans une holding” : à chaque nouvelle alternance politique la télévision publique est sur la sellette, alors qu’elle se porte bien. Un équilibre toutefois fragile et obtenu grâce au talent des salariés et des créatifs qui travaillent au sein de FTV, un équilibre fragile alors qu’on ne cesse d’être contraints par des plans d’économies successifs.

On ne fait pas Hollywood avec des structures technocratiques, mais avec les histoires qu’on raconte aux gens. La création, que ce soit dans les fictions, séries TV ou dans les contenus d’information, n’est pas qu’une affaire de moyens ou de casse-tête chinois ; c’est d’abord une question de sens. Les “casse-têtes chinois”, ne sont-ce pas ces projets de réorganisation qui défilent depuis plusieurs semaines voire depuis quelques années dans les médias pour à chaque fois réformer France Télévisions ? Soit ils sortent des cartons du ministère de la Culture, soit ils germent dans les têtes de certains qui méconnaissent le monde de la culture du temps présent. Celui de la télévision est en fait un trait d’union entre le passé révolu et l’avenir infigurable, c’est en quelque sorte le « ici et maintenant » de la littérature de l’image. Dans tous les cas, ces projets n’ont rien à voir avec la création. Ils sont sortis d’une technocratie doctrinaire qui engendre la confusion et prend le risque de briser l’audiovisuel public français. Un journaliste de radio est différent d’un journaliste de télévision. Une pièce radiophonique sur France Culture n’a rien à voir avec “Capitaine Marleau” de Josée Dayan. C’est comme si l’on confondait Shakespeare et La Fontaine. Et vouloir rassembler de façon aussi brusque France Télévisions et Radio France risquerait de mettre à mal un audiovisuel public qui rassemble des millions de personnes quotidiennement, quand le livre perd hélas des lecteurs chaque jour. Mais casser l’audiovisuel ne fera hélas pas revenir les lecteurs au livre-papier. Car c’est bien un nouveau monde qui est en train de naître.


ORTF : on ne peut pas refaire du neuf avec du vieux

À ceux-là qui pourraient nous conduire dans l’impasse de la confusion, nous disons que nous avons à redécouvrir l’activité de penser autrement la télévision. Et cela ne se réduit certainement pas à “faire du neuf avec du vieux”. Nous avons à construire une nouvelle télévision capable de fédérer, et surtout de transmettre à tous cette culture qui est la nôtre, en France, pays de l’exception culturelle.

Qui n’a pas compris qu’une seule soirée de télévision peut être aussi enrichissante qu’une salle de théâtre remplie pendant plusieurs années ? De plus en plus, la télévision reste le principal vecteur de démocratie culturelle, d’autant plus qu’elle s’invite partout…y compris dans les foyers qui n’ont pas accès (ou trop peu) à la culture.

La question est : qu’avons-nous à écrire comme scénario qui va raconter aux publics de nos chaînes de TV publiques ce qui fait sens dans leur vie ?

Cette semaine, le journal Le Monde a fait ses choux gras d’un document qualifié aujourd’hui de « document de travail » par le ministère de la Culture. Le projet prévoit de « rassembler France Télévisions et Radio France, mais aussi de supprimer France Ô : des pistes chocs du ministère de la Culture selon le journal du soir ». Dans ce même projet est prévu l’abandon des canaux hertziens de France 4 et du Mouv’ pour une diffusion sur le web, et même la fermeture des bureaux régionaux de France 2. Or, ces bureaux sont des éléments moteurs dans la réalisation des JT de la chaîne. Les 10 bureaux ont fait leurs preuves grâce à leur réactivité et leur sérieux même si la Cour des Comptes a préconisé leur fermeture dans son dernier rapport d’octobre 2016.

Que dit ce rapport publié dans le Monde ?

Cette contribution au Comité Action Publique 2022 voudrait « réformer en profondeur l’audiovisuel public ». Une réforme de plus qui s’ajouterait aux nombreux plans précédents de réorganisation de l’audiovisuel public qu’on ne compte plus. Que dire notamment du dernier rapport de Fondapol, décrié au sein même de la famille politique dont il émane ?

Comment comprendre que ce qui était affirmé comme une conviction lors de la campagne présidentielle serait ainsi abandonné ? Nous pensons notamment à l’idée d’inviter les différents groupes publics à travailler ensemble (dans l’esprit du projet France Info) mais sans aller plus loin dans la démarche.

Que faut-il comprendre exactement de tout cela ?

Nous devons garder le cap afin d’honorer notre mission de service public rappelée par la loi : informer, divertir, distraire (missions attribuées à FTV par l’article 43 – 11 de la loi du 30 septembre 1986).  Il nous faut les moyens de nous battre, salariés de la télévision publique, dans un monde où le digital est en mutation, et non des technostructures vidant l’entreprise de ses salariés et de son savoir-faire.