RUPTURE CONVENTIONNELLE COLLECTIVE DE FRANCE TÉLÉVISIONS/ Résultats de la consultation FO

Un syndicat responsable doit aussi savoir défendre l’entreprise.

Le 7 février dernier, le syndicat Force Ouvrière a lancé une consultation générale concernant le plan de rupture conventionnel collective de France Télévisions (RCC). Il incite financièrement à faire partir volontairement 2000 personnes avant 2022 ; il prévoit l’embauche d’au moins 1000 salariés dont 50% de CDD réguliers, afin de rééquilibrer la pyramide des âges, d’obtenir des compétences liées notamment à la révolution du digital et aux nouveaux métiers. Il met en place des dispositifs de valorisation des efforts pour les salariés qui restent.

Le solde total de suppressions d’emplois ne pouvant excéder 900 équivalents temps plein (ETP) à l’horizon 2022.

Ce sondage réalisé via l’application spécialisée SurveyMonkey auprès de l’ensemble des salariés, s’est achevé le 31 mars dernier. Sur les 4226 suffrages exprimés en réponse à la question « Êtes-vous favorables à la signature par les organisations syndicales du Plan de Recomposition des Effectifs (RCC) ? » nous avons recueilli :

4226 suffrages exprimés – Oui : 2362 voix, Non 1618 voix, Ne se prononce pas 246 voix.

1/ Conditions de validité du texte

Le Bureau National Force Ouvrière de France Télévisions,  qui  s’est  réuni le 10 avril, prend acte qu’il a mandat de la part des salariés pour signer cette RCC. Le texte final sera mis à la signature du 19 au 26 avril prochain.

En tout état de cause, le texte ne peut être validé que si au moins 50 % de la représentativité des organisations syndicales signent le texte. Pour cela il est nécessaire que les 3 organisations syndicales qui ont participé aux négociations -FO, CFDT, SNJ- signent ensemble le texte. A elles trois, elles cumulent 60% des suffrages des salariés lors des dernières élections. Elles peuvent donc assurer la validité de cet accord en le ratifiant. La CGT ayant quitté la table des négociations dès la deuxième réunion, il est peu probable qu’elle appose sa signature.

 Dans tous les cas, Il n’est pas question pour Force Ouvrière de signer seul ce texte, chacun devra prendre ses responsabilités devant les salariés.

La loi prévoit que des organisations syndicales signataires qui dépasseraient au total 30 % de représentativité, mais qui ne dépasseraient pas les 50 % requise pour une majorité, peuvent demander un referendum d’entreprise concernant cette RCC, à condition que la majorité des autres syndicats ne s’y opposent pas. De même, la direction peut exiger un referendum.

Nous le disons tout net, FO considère que ce référendum a déjà été organisé via notre consultation générale, et nous ne souhaitons pas nous lancer dans une telle opération.

 

2/ Les raisons du « OUI »

 Ce nouveau plan de recomposition des effectifs a été au cœur des préoccupations des salariés ces dernières semaines, la participation massive à ce sondage en est une preuve.  Mais au-delà de ce constat, il convient de chercher les raisons qui ont poussé les salariés à s’exprimer favorablement à la signature de ce plan de recomposition des effectifs.

D’abord il faut le reconnaître, la négociation a apporté une refonte profonde du texte initial proposé par la direction. FO a particulièrement été actif et n’a rien lâché sur ses revendications :

1- Les indemnités de départs à la retraite sont quasiment multipliées par 3 par rapport à notre accord collectif et sont non-imposables : Jusqu’à 15 mois de salaire brut.

 2- Le solde de suppression de postes est passé de 1000 à 900 (soit 10 % d’emplois gagnés). 

 3- La direction s’engage à prioriser au moins 50 % de salariés intermittents ou pigistes réguliers sur les 1000 embauches prévues (c’est une vraie contrainte pour les RH)

 4- La direction s’engage à racheter jusqu’à 4 trimestres à hauteur de 20.000 € pour les départs à la retraite

 5- La direction s’engage à maintenir le salaire pendant 9 mois pour ceux qui décident de créer ou de reprendre une entreprise. Elle a consenti des dispositifs très incitatifs pour les mobilités externes.

3/ Des efforts valorisés

FO n’a eu de cesse au cours des négociations, de ne pas se focaliser sur les conditions de départs de ceux qui nous quittent, mais de se préoccuper des 8000 salariés qui restent et qui devront assumer la charge de travail transitoire supplémentaire.

Cette RCC, nous le savons tous, aura forcément des impacts sur les organisations de travail. D’ailleurs la direction s’est lancée dans l’expérimentation de nouveaux métiers qui visent justement dès maintenant à compenser les effectifs. C’est une manière pour eux d’envisager la transition vers le numérique. Notre syndicat sera particulièrement vigilant à ce que ces nouvelles organisations ainsi que les nouveaux textes collectifs qui en découleront ne fragilisent pas davantage les salariés. Nous rappelons que c’est le 3ème plan de réduction des effectifs que nous subissons en 10 ans et que nous allons donc perdre, au final, un total de 20 % de nos postes sur la période concernée !

Il fallait donc « protéger » au maximum ceux qui restent. C’est ce que nous avons cherché à obtenir durant la négociation.

Une prime d’intéressement destiné à tous les salariés de l’entreprise sera mise en place dès 2020 pour toute la durée de la RCC. Elle permettra de récompenser et de mieux répartir les efforts consentis par les salariés.

Concernant l’activité, la direction s’engage jusqu’en  2022, à ne pas externaliser nos productions ou à tout faire pour maintenir la fabrication de nos émissions dans notre société, notamment les météos de France 3.

France Télévisions s’engage également à maintenir jusqu’en 2022 tous les budgets des actions sociales et culturelles (ASC) au même niveau qu’en 2019 malgré les suppressions d’emplois

Les dispositifs de formations seront maintenus et améliorés afin d’évoluer vers des nouveaux métiers au sein de France Télévisions. Ces évolutions permettront des avancements individuels de carrière.

4/ Le périmètre des salariés de France Télévisions protégé

 Ce qui importe le plus pour FO, dans un contexte d’agression perpétuelle du service public par le Gouvernement, c’est l’opportunité de bénéficier du statut « protecteur » que permet cette RCC au moins jusqu’au 31 décembre 2022. Cette vertu protectrice est sans doute ce qui incline une majorité de salariés à se prononcer pour le  «Oui à la signature ».

La DIRRECTE, émanation du Ministère du Travail, a confirmé aux organisations syndicales représentatives qu’il serait impossible, durant toute la durée du plan, même en cas de  fusion ou d’absorption par une autre entité (on pense notamment au projet de Holding avec Radio France) d’aller au-delà des 900 suppressions de postes. Tout le périmètre de France Télévisions serait ainsi « protégé ».

Sans cette protection, les salariés savent que dans le cadre du projet de loi sur l’audiovisuel prévu à l’été prochain, le scénario pourrait peut-être bien pire que ce qui nous attend. Nous ne serions pas la première chaîne de service public en Europe touchée par un véritable Plan Social.

5/ Tout le monde doit être concerné y compris les hauts salaires et les dirigeants ! 

Dans un contexte budgétaire contraint où nous devons trouver 360 M€ avant 2022, principalement sur la masse salariale. FO considère que si le texte de la RCC est effectivement incitatif pour une majorité de candidats aux départs, il n’en demeure pas moins que les hauts salaires, notamment dans l’encadrement du Siège de France Télévisions, rechignent à quitter l’entreprise, les incitations aux départs restant très modestes pour eux. Pourtant ce sont d’abord eux qui sont visés par le gouvernement pour faire baisser prioritairement la masse salariale pour l’entreprise.

Dans ces conditions, quid de la diminution de la masse salariale ?

En sachant que le salaire moyen d’un journaliste encadrant au Siège de France Télévisions avoisine 108.000 K€ (cf. la BDES : Base de Donnée Economique et Sociale) quel intérêt pour eux de partir de l’entreprise dans le cadre d’une RCC, en sachant que le plafond proposé dans le texte est  de 160.000 € ?

Ne risquons-nous pas, une nouvelle fois, avec une forte majorité de départs des opérationnels au détriment des encadrants dont, il faut bien le dire, les salaires plombent la masse salariale, de ne pas faire les bons choix stratégiques comme le souligne le rapport de la Cour des Comptes concernant France Télévisions ?

A moins qu’à notre insu, l’entreprise ne négocie des départs individuels ou des transactionnels sans aucune transparence ? …

En tout cas, pour FO nous n’y sommes pas favorable : inévitablement, car cela viendrait à grever la future enveloppe destinée à la prime d’intéressement. Il faudra donc être vigilant dans cette période où tous les salariés seront encore une fois appelés à se réformer et à innover, de s’assurer que tous les principes de réductions et de réformes concernent aussi notre management, son organisation et nos dirigeants.

6/ Etre responsable

Personne n’est à l’aise dans une organisation syndicale pour négocier et encore moins signer un plan visant à réduire les effectifs. Mais notre responsabilité est aussi de prévoir et d’anticiper les coups qui pourraient être fatals à la survie de notre entreprise. La récente annonce de la volonté de supprimer la redevance par le ministre du Budget, nous prouve que nous ne sommes pas une priorité pour le Gouvernement. Il faut en prendre acte et nous organiser autant dans l’intérêt du collectif de France Télévisions que dans la défense individuel de chaque collègue.