Une intervention de FO en Comité de Déontologie a permis d’obtenir certaines clarifications de la direction.
Est-il possible de s’exprimer librement sur Twitter et sur les réseaux sociaux, y compris en critiquant des Tweets postés par des responsables de France Télévisions sur leurs comptes personnels ou sur ceux des différentes antennes du groupe ?
La question est importante, car elle touche au principe fondamental de la liberté d’expression, dont théoriquement jouissent AUSSI les journalistes ainsi que tous les salariés du service public de l’audiovisuel.
L’évidence de ce principe ne l’est d’ailleurs pas pour tout le monde. Est-il besoin de rappeler la mésaventure d’un journaliste de la rédaction nationale de France 3 qui, en octobre dernier, avait été menacé de sanctions après avoir critiqué sur Twitter les choix éditoriaux d’un animateur emblématique de France 2 ? On ne badine pas avec le Crime de lèse-Ruquier au royaume de Dame Ernotte.
Pourtant, il peut arriver que France Télévisions dérape à son tour, suscitant chez certains le désir légitime de protester et de faire entendre une voix dissidente.
Un récent incident a au moins permis d’obtenir certaines clarifications de la part de la direction.
Ainsi, le 24 janvier dernier, Franceinfo: a mis en ligne sur son compte Twitter cette vidéo du metteur en scène Jean-Michel Ribes qui, sur le plateau, avait traité Donald Trump de « gros con« , ajoutant que le nouveau président américain avait élu par « des catégories humaines sans intérêt« .
Cette petite phrase de JM Ribes, très éloignée des règles de neutralité en vigueur dans le service public, a provoqué l’indignation de nombreux internautes. On peut les comprendre.
Imagine-t-on le tollé si de tels propos avaient été émis par une personnalité d’extrême droite? Si un invité du FN avait stigmatisé telle ou telle « catégorie humaine« , Franceinfo : aurait-il diffusé un tel extrait de manière aussi complaisante, sans la moindre distance ni mise en garde?
Mais il s’agit de Trump. Mais il s’agit de Ribes. Donc tout semble permis.
Dès lors, est-il possible de critiquer publiquement le fait d’avoir mis en valeur cet extrait affligeant sans craindre de subir une menace de sanction venue des sphères supérieures de France Télévisions?
Est-il licite au regard des règles de France Télévisions de retwitter les protestations des internautes sans prendre le risque de se voir exposé à une procédure disciplinaire?
Alerté à ce sujet par Force Ouvrière lors du dernier Comité de Déontologie, Michel Field a :
- d’une part reconnu le caractère inacceptable du dérapage à l’antenne du metteur en scène JM Ribes et donc du tweet qui en a fait la promotion.
- Mais surtout, le directeur de l’information a reconnu dans son principe le droit des journalistes et aussi celui de tous les salariés de la chaîne de manifester sur les réseaux sociaux leurs désaccords, quand bien même leur opinion irait à l’encontre de celle exprimée sur les comptes officiels de France Télévisions.
Michel Field – et c’est tout à son honneur – a reconnu le droit à la polémique et à la controverse dans la mesure où il s’exprime de manière civilisée en évitant bien sûr les injures et les invectives. Il a déclaré « être pour les réponses et le fait de retwitter afin de signifier son mécontentement, cela alimente le buzz d’ailleurs ».
Il va sans dire que tout cela demande à être précisé, affiné.
Mais en attendant, nous ne saurions qu’encourager les salariés de France Télévisions à jouir pleinement de ce droit qui vient d’être réaffirmé…
La liberté d’expression, comme celle de la presse, ne s’use que si l’on ne s’en sert pas.