Ce compte-rendu est rapporté sous forme de questions-réponses, de façon succincte et avec l’essentiel des propos tenus.
Questions ultramarines
Des animateurs –qui ne sont donc pas journalistes- animent les « live Face-Book » sur des faits d’actualité. Quelle est leur formation, leur légitimité ?
Réponse – Cette couverture est validée par la direction éditoriale, sous l’autorité d’un encadrement. Ce mode d’organisation et de fonctionnement permet de compléter la production antenne et le travail de la rédaction et de répondre aux attentes du public.
Questions transversales
Plusieurs questions concernent l’emploi fréquent de micros-trottoirs dans les reportages : or il ne s’agit pas d’enquêtes et les réponses des personnes dans la rue n’ont aucune valeur de sondage, d’où le fait que de nombreux consœurs et confrères des rédactions expriment leur désapprobation quant à ce recours abusif.
Réponse – Le fait que cette question revienne à plusieurs reprises témoigne, selon la direction, de la réalité du problème. Mais elle estime qu’il faut y apporter une réponse nuancée.
Elle admet qu’un reportage diffusé le 7 novembre dans le 13 heures de France 2 sur les recommandations du port du masque par l’académie de médecine, dont les interviews étaient exclusivement des micros-trottoirs, sans la moindre intervention d’un médecin ou d’une autorité scientifique n’était pas satisfaisant.
Pour autant, le principe de l’insert de micros-trottoirs dans les reportages n’est pas illégitime. Le micro-trottoir n’a certes pas la valeur d’un sondage mais « il permet de donner la parole au simple citoyen, à l’homme et à la femme de la rue ». Bien entendu, il ne peut se suffire à lui-même et sa pratique doit être encadrée.
Le 4 novembre, les reportages de l’ensemble des journaux (12/13, 13 H, 19/20, 20 H) consacrés à l’affaire Grégoire de Fournas ont diffusé des micros-trottoirs favorables au député RN.
Réponse – Ce n’est pas tout à fait exact. Une équipe avait été envoyée à Bruay La Bussière, où le vote RN est très fort, pour prendre le pouls de la population. Une autre équipe a été envoyée dans la circonscription du député Carlos Martens Bilongo (LFI) impliqué dans la polémique. La démarche n’avait rien d’illégitime. Ce n’était pas au sens basique du mot des « micros-trottoirs » puisque ces deux circonscriptions étaient jugées significatives et que les personnes interrogées l’étaient à titre d’administrés et d’électeurs potentiels. Nous sommes allés dans les deux bastions de chaque camp. Les équipes envoyées ont fait leur travail de manière très professionnelle ainsi qu’en attestent les rushes. La diversité des personnes interrogées a été respectée et les relances étaient pertinentes.
Cela étant dit, il y a eu un réel problème sur le sujet du 20 heures de France qui, effectivement, n’a retenu que des réactions favorables à Grégoire de Fournas. Cette mauvaise exploitation des rushes, qui étaient excellents, a donné lieu à une explication et un sérieux recadrage avec l’encadrement.
Un guide des bonnes pratiques
En réponse à toutes ces interrogations, Nathalie Saint Cricq et Pascal Doucet-Bon ont été chargés par la direction de la rédaction de travailler sur un cadre indicatif concernant la bonne utilisation des micros-trottoirs. Ce texte, bien sûr, n’aura pas de valeur réglementaire mais il permettra de clarifier les choses pour ceux qui le souhaitent. Il sera transmis à l’ensemble des éditions, dans les prochaines semaines.
Encore une fois, il ne faut pas diaboliser les micro-trottoirs. Leur usage n’est pas mauvais en soi. On le constate lorsqu’on consulte les archives de l’INA : ça donne la couleur, la température d’une époque. Il faut juste veiller à ne pas en abuser et à ne pas dévoyer la pratique.
Affaire Grégoire Fournas – coupe problématique dans une interview de Yaël Braun Pivet.
Le jeudi 3 novembre, au démarrage de la polémique, alors que se pose la question de la teneur exacte des propos du député RN Grégoire de Fournas, une interview dans les couloirs de l’Assemblée nationale de Yaël Braun Pivet a subit une coupe qui semble en altérer le sens.
Voici l’extrait diffusé dans le 20 heures :
« Moi, j’ai entendu ’’retourne en Afrique’’ (coupe), nous avons du personnel qui est en charge du compte rendu. Nous avons des enregistrements. Donc nous allons pouvoir établir la matérialité des faits ».
Or la déclaration intégrale de Yaël-Braun Pivet est :
« Moi, j’ai entendu “retourne en Afrique’’. Après, la question se pose de savoir : est-ce que c’est ’’retourne en Afrique’’ ou ’’qu’il retourne en Afrique’’ ? Donc nous allons voir…Nous avons du personnel qui est en charge du compte rendu. Nous avons des enregistrements. Donc nous allons pouvoir établir la matérialité des faits (en vue de cette convocation au bureau qui pourra se tenir dès demain) »
(La coupe opérée est en gras).
Réponse – La direction estime que cette coupe n’altère pas la compréhension du sujet. Il était très clairement indiqué dès le début de reportage que la question était de déterminer les propos exacts du député RN. Une palette graphique, précédant les propos de Yaël Braun-Pivet, exposait les deux versions de la phrase lancée depuis la tribune.
Le syndicat FO estime néanmoins que la réponse n’est pas totalement satisfaisante. Si le reportage exposait effectivement de manière claire les enjeux de la polémique, il n’en reste pas moins que les propos de Yaël Braun-Pivet ont été dénaturés, que la coupe opérée supprime l’élément de doute exprimé par la présidente de l’Assemblée nationale. Cette nuance était fondamentale et concernait le cœur de la polémique.
Coupe du monde de football au Qatar – Les accréditations interdisent tous tournages en marge de la coupe du monde. De nombreux endroits ne sont pas accessibles aux journalistes.
Réponse – Lors des négociations que nous avons eues avec les autorités locales, il nous avait été assuré que nous pourrions filmer ce que nous voulions. Nous avons émis quelques inquiétudes au sujet des mentions figurant sur les accréditations qui limitent drastiquement tous les tournages en marge des compétitions sportives.
Nous n’avons pas obtenu le retrait de ces restrictions, mais nos interlocuteurs nous ont assuré verbalement que, dans la pratique, sur le terrain, ils sauraient faire preuve de souplesse.
Nous avons pris acte de ces garanties verbales tout en indiquant que nous nous réservions le droit de ne pas respecter l’accréditation si nécessaire pour faire notre métier. Et en décrétant que nous quitterions le pays à la moindre contrariété.
Le libellé de cette accréditation n’était bien évidemment pas acceptable. Mais ne pas y aller n’aurait, à notre sens, pas été constructif.
Ce pragmatisme semble avoir donné de bons résultats. Nous constatons qu’on nous laisse travailler. Les équipes de FTV ont pu réaliser des reportages sur l’interdiction d’alcool et sur les problèmes des supporters LGBT… Ces reportages ont été diffusés à des heures de grande écoute. Pour le moment ça se passe bien.
Collaborations extérieures – La direction est-elle informée des interventions des journalistes dans les autres médias. Doit-on informer systématiquement la direction ?
Réponse – Oui. Même si en cas d’urgence, l’accord doit être fait oralement. La non-rémunération ne change rien. Toute collaboration extérieure doit être préalablement déclarée.
Être invité ou interviewé par un média autre que le service public, c’est alimenter l’antenne d’un média concurrent.
La question se pose à chaque fois. La réponse apportée doit être traitée au cas par cas.
Concernant la question des invitations pour assurer la promotion d’un livre dont un collaborateur de FTV est l’auteur, nous devons statuer sur la question de la durée autorisée de cette promotion. La question reste ouverte. Il y aura un débat interne.
Une durée de 3 mois est envisagée.
Dans tous les cas, il faut solliciter une autorisation.
Changement de process : courant janvier, les déclarations se feront via « mon quotidien » dans MonKiosque et seront directement supervisées par la direction de l’information.
Le syndicat Force Ouvrière attire l’attention de la direction sur les aspects touchant à la liberté d’expression et aux libertés publiques. S’il est vrai qu’il faut prendre en compte les questions de concurrence, il peut aussi peut-être veiller à ne pas limiter de manière trop rigide les possibilités de se rendre sur un plateau ou dans un espace public pour débattre et prendre la parole. Les journalistes sont aussi des citoyens et leurs droits fondamentaux, à cet égard, ne peuvent être moindres que ceux de leurs contemporains.
Le contrat de travail prévoit une exclusivité, rappelle la direction. Mais il y aussi le principe de liberté de travailler. Il faut prendre en compte les questions de concurrence et de conflit d’intérêt. On ne peut pas tout interdire sans justification.
Il y a donc possibilité de collaborations exceptionnelles.
Ce qui permet d’interdire toute invitation, c’est l’atteinte aux intérêts de l’entreprise.
Qu’en est-il du partenariat du 13 heures avec Le Parisien sur l’environnement ? Quid de la ligne éditoriale ?
Réponse – La liberté éditoriale sera totale. Hors de questions de se faire dicter une ligne éditoriale. Nous partageons des thématiques communes. Avec échange de visibilité. Nous ne rémunérons personne.
Serons-nous désormais vigilants sur les contradictions entre les micros-trottoirs alléguant la satisfaction de températures très hautes pour la saison et dans le même JT des reportages sur l’urgence d’agir pour le climat ? (la grande qualité des reportages concernant l’environnement n’est pas du tout en cause)
Réponse – Nous y faisons attention, il est vrai que des erreurs ont été commises, notamment dans un JT où cela a été flagrant. Désormais nous veillons à ce que cela n’ait plus lieu.
Un sujet concernant l’affaire Lola sur les OQTF a-t-il été censuré sur pression d’une SDJ ?
Réponse – Non, il n’y a eu aucune censure. Il y a eu un débat un peu vif à propos de la place du sujet dans le conducteur. La direction de la rédaction a donné pour consigne de séparer dans le traitement du sujet le volet judiciaire du volet politique et de remettre le sujet dans le cadre politique pour éviter toute dérive populiste. C’est ce qui a été demandé à chaque édition. Le rédacteur en chef d’une édition a refusé et dans ces conditions a préféré retirer le sujet du conducteur.
Concernant le papier sur les OQTF publié sur le site internet des Hauts de France, la direction a reconnu qu’il s’agissait d’une erreur, le papier a été modifié et enrichi pour le rééquilibrer. Il a été rappelé que le web ne devait pas publier d’édito et que les rédacteurs en chef devaient être vigilants.
Il n’y a eu aucune « pression » venue des SDJ. Une SDJ s’est émue effectivement d’un certain nombre de choses. Il y a eu débat. Il n’y a aucune co-gestion sur l’organisation de la ligne éditoriale décidée par la direction.
FTV a-t-il l’intention d’adhérer au Conseil de Déontologie Journalistique et de Médiation (CDJM) ?
Réponse – Nous suivons de près les activités du CDJM qui fait un travail conséquent.. Nous le considérons comme un interlocuteur modéré et sérieux. Nous sommes en dialogue avec eux lorsqu’ils nous sollicitent.
Cependant, se pose à nos yeux un problème de diversité syndicale. Hormis le SNJ qui est très présent et la CFDT qui y dispose d’un strapontin, les autres organisations ne participent pas aux travaux du CDJM. Très peu de grands médias y sont représentés.
Par ailleurs, nous considérons que la profession est déjà très surveillée, notamment par l’Arcom, sans compter l’institution judiciaire. Le CDJM arrive « un peu tard » sur ce terrain, et nous ne souhaitons pas rajouter de contraintes supplémentaires, car FTV en dispose de nombreuses..
Le CDJM est dans une démarche contentieuse, cela fait une démarche contentieuse de plus. Nous estimons qu’il y a d’autres moyens pour assurer une information de qualité, notamment les labels qui n’ont pas cette approche contentieuse.
Pour toutes ces raisons, nous ne souhaitons pas pour le moment y adhérer.
Lors de nos contacts avec le CDJM, nous leur avons exposé toutes ces objections.
Guide des réseaux sociaux
Le nouveau guide du bon usage des réseaux sociaux va prochainement sortir. Il sera envoyé aux organisations syndicales pour avis. Il ne s’agit pas d’une négociation. Le texte est presque prêt. Il sera porté par la direction de l’info et la direction de l’éthique et de la conformité.
France Télévisions a-t-elle l’intention de rester sur Tweeter ?
Réponse – Oui pour le moment. On verra à l’avenir.
Vos élus FO:
Isabelle Ganne, Marie pierre Samitier, Clément Weill-Raynal.