Compte rendu de vos journalistes élus FO : SAMITIER Marie-Pierre – SOLARI Jean-Christophe – WEIL RAYNAL Clément
Etaient présents pour la Direction : LETRANCHANT Yannick – DOUCET-BON Pascal – RODAIX Alain – DEBAINS Frederic – KARA Alexandre – TORTORA Christophe – GUILLIN Sophie
Force Ouvrière a découvert l’existence d’un site marchand baptisé « Le Dressing du PAF » qui permet d’identifier la marque des vêtements portés par les présentatrices et animateurs TV et de les acheter. La direction de France·tv est-elle au courant de l’existence de ce site. Les journalistes prêtent-ils leurs concours à ce système de promotion-vente où est-il réalisé à l’insu de leur plein gré? Dans ce dernier cas, ne s’agit-il pas d’un détournement abusif d’image et France Télévisions ne se doit-elle pas d’intervenir pour faire cesser de telles pratiques?
- Réponse – la direction ignorait totalement l’existence de ce site et remercie le syndicat FO d’avoir attiré son attention sur son existence. Il va sans dire qu’aucun collaborateur de France Télévisions n’a jamais participé de près ou de loin à un tel système de promotion commerciale. Nous avons immédiatement mandaté le service juridique qui a adressé une mise en demeure au « Dressing du PAF » afin qu’il retire toute image et mention des présentateurs de France Télévisions.
Le syndicat Force Ouvrière s’étonne de la diffusion le samedi 30 mai dans le cadre des programmes de Télématin (C’est un monde) d’un reportage vantant l’action du Hezbollah dans la lutte contre l’épidémie de Covid19 au Liban. A aucun moment, il n’est indiqué dans le commentaire que le Hezbollah est classé officiellement sur la liste des organisations terroristes de plusieurs pays dont la France. Est-il normal d’avoir utilisé à l’appui de ce reportage très élogieux des « images de propagande » fournies par le Hezbollah lui-même?
- Réponse – Une partie de la production des reportages diffusés dans cette tranche horaire nous échappe. Ce reportage était produit par la société de production Caravelle. Le pitch écrit du reportage soulignait bien que le Hezbollah est une « organisation terroriste », ce que devait souligner le correspondant au Liban Sylvain Lepetit dans le direct qui faisait suite à ce reportage. En raison d’un manque de temps, le direct a dû être supprimé au dernier moment. Une incrustation mise à l’antenne a bien précisé qu’une séquence provenait « d’images de propagande du Hezbollah ».
Dans quelle circonstance le terme « féminicide » peut-il être employé à l’antenne? Cette question fait suite à un débat houleux survenu lors de la fabrication d’un journal au BRI de Caen, le chef de service adjoint s’étant opposé à l’emploi de ce mot par une journaliste du web en arguant du fait que l’expression « ne figure pas dans le code pénal ».
- Réponse de la direction – L’emploi de ce mot est parfaitement possible si c’est approprié en l’espèce. Le vocabulaire journalistique ne se confond pas de manière exclusive avec celui répertorié dans le code pénal. Certes, ce n’est pas une expression générique à utiliser sans discernement. Cela dépend de chaque sujet et de chaque situation.
Dans quelles conditions ont été réalisés des reportages à l’intérieur de maisons de retraites de la chaîne Korian au plus fort de la crise sanitaire. Cette société a sollicité les rédactions pour des « visites sur les lieux ».
- Réponse direction – la direction accepte de répondre bien qu’elle estime que cette question relève plus de l’éditorial que de la déontologie. Ce n’est pas parce qu’on nous invite à pénétrer dans les locaux que le reportage s’en retrouve dithyrambique ou publicitaire. Des reportages similaires ont été effectués dans des maisons de retraites appartenant à d’autres chaînes. Le traitement de la question de l’impact de la crise sanitaire sur les résidents des maisons de retraites a été l’un des plus complets sur Francetv – à l’antenne comme sur le Web – comparé aux autres médias. Le résultat n’avait rien de complaisant. Korian nous a même menacé de poursuites en diffamation et ne s’est ravisé qu’après que nous leur ayons montré les rushs, qui attestaient largement du ton des reportages. Ils ont retiré leur plainte. Cela démontre un traitement journalistique musclé.
« L’œil du 20 h« , consacré à l’absentéisme des profs a suscité de vives réactions. Certaines organisations syndicales considèrent que ce reportage n’était constitué que d’accusations et manquait de nuances, alors que le taux de professeurs ayant totalement décroché pendant le confinement n’est que de 5%. Aucun syndicaliste n’était interviewé pour effectuer un contrepoint.
- Réponse – France Télévisions a fait plus de 30 sujets sur la manière dont les professeurs ont continué de travailler. Et nous avons indiqué à de nombreuses reprises que 95% des enseignants ont été exemplaires face au Covid19. Nous avons eu une info, nous indiquant que 5% des profs avaient cependant « disparu » des radars. Nous avons considéré que l’information était importante et nous en avons fait un sujet. Il n’est pas acceptable de mettre ainsi en cause le travail d’un confrère qui subit aujourd’hui un cyber harcèlement à la suite de la diffusion de ce reportage.
La crise du covid19 nous a amené à utiliser des images extérieures et a bouleversé certaines méthodes de travail. Est-il acceptable de diffuser des « sujets autotournés » sur smartphone? Ces pratiques sont-elles exceptionnelles ou seront-elles amenées à être pérennisées?
- Réponse – on ne s’interdit pas d’utiliser ce genre de traitement à condition de conserver un regard éditorial. Cela passe par une validation du rédacteur en chef ou du chef de service. Cette formule a été utilisée avec succès au 13 h de France 2. Cela permet de montrer en situation comment les Français vivaient le confinement. Ça ne pose pas de problème déontologique, si on respecte les règles. C’est UN élément parmi d’autres qu’on peut utiliser dans certaines circonstances. Il appartient au rédacteur en chef de vérifier que ce mode narratif est adapté au sujet. C’est évident que lorsqu’il s’agit de sujets plus polémiques nécessitant un équilibre entre des positions contradictoires, le sujet autotourné est à proscrire.
La direction peut-elle expliquer dans quelles circonstances les images de la visite d’Emmanuel Macron à l’hôpital du Kremlin-Bicêtre ont-elles été tournées et diffusées. Les images et les dialogues diffusés à l’antenne ne reflétaient manifestement pas l’essentiel de la visite ?
- Compte tenu des circonstances et des conditions de fabrication, les premières éditions n’ont pas eu la possibilité de regarder la totalité des rushs, ce qui aurait permis effectivement de prendre la mesure réelle du déroulé de la visite de Macron. Dans un premier temps, nous n’avons utilisé que le début des rushs. Il faut souligner que nous étions tributaires des images du pool et que nous travaillions dans le cadre du confinement, ce qui a ajouté aux difficultés de fabrication. Mais dès les heures et les jours qui ont suivi, nous nous sommes « rattrapés ». Pendant près de 48 heures, nous avons diffusé sur l’ensemble de nos antennes les éléments qui rendaient mieux compte de la visite de Macron.
N’y a-t-il pas eu sur cette dernière période de trop nombreuses interventions de membres du gouvernement et du Président de la République ?
- Les équilibres prônés par le CSA ont été strictement respectés. Il ne faut pas confondre égalité et équité. Dans cette période de crise exceptionnelle, il est incontournable de diffuser les déclarations du Premier Ministre ou du Ministre de la Santé – pour ne citer que ceux-là – lorsqu’ils annoncent des mesures fortes voire sans précédent, comme le confinement généralisé, les mesures sanitaires mises en œuvres, le début du déconfinement, … .
Dans quelles conditions la hiérarchie de FTV est-elle intervenue pour modifier un article qui détaillait la manière de « manifester dans des conditions sanitaires acceptables »? Le journaliste auteur de cet article a par la suite été l’objet de harcèlement hostile sur les réseaux sociaux.
- Réponse – La direction de l’information reconnaît être intervenue pour faire modifier le titre et le chapeau qui pouvait être interprétés comme une incitation à manifester. Ce n’était pas le propos de l’article, bien entendu, mais subsistait dans le titre et le chapeau une ambiguïté qu’il était souhaitable de lever. Le journaliste a effectivement été par la suite l’objet d’attaques injurieuses et nauséabondes sur les réseaux sociaux et a bénéficié du soutien de la hiérarchie. La direction en profite pour signaler la création d’une plaquette « anti-harcèlement » pour indiquer aux journalistes la conduite à tenir en pareil cas. Ce document devait être présenté et mis à la disposition des collaborateurs de France Télévisions juste avant la crise du Covid19. La procédure de confinement a repoussé l’échéance. La plaquette sera prochainement présentée. Il y a en moyenne quatre cas par mois de harcèlement de ce type qui sont signalés à la direction.
Au mois de mars, la diffusion par France 3 Occitanie du témoignage d’une infirmière nommée « Marie » a suscité de nombreuses critiques, des articles de presse et des tracts. Dans quelles conditions cet article a été rédigé puis amendé?
- Réponse – La direction a réexaminé attentivement le cheminement de ce témoignage, repéré par un journaliste sur Twitter, dans lequel l’infirmière évoquait un malade face à la mort. L’article a entrainé de nombreuses mises au point et communiqués contradictoires notamment de l’ARS et du CHU. Rien ne permet de dire aujourd’hui que ce témoignage n’était pas authentique.
N’y a-t-il pas un trop grand recours à la pratique du « micro-trottoir », notamment dans les sujets concernant le confinement et la crise sanitaire du Covid19?
- Réponse – la direction réfute cette question récurrente qu’elle juge mal fondée et récuse le terme de « micro-trottoir ». Quand on interroge des gens à la sortie d’un magasin pour savoir comment ils vivent le confinement, ce ne sont pas des « micro-trottoir », ce sont des récits vivants de françaises et de français ordinaires qui racontent de la manière dont ils vivent la crise sanitaire. Pour certains types de sujets, ces interviews dans la rue ont une vraie valeur journalistique.
Certains syndicats s’inquiètent de la disparition – à l’occasion de la crise du Covid19 – de conférences de rédaction dignes de ce nom dans plusieurs rédactions ultramarines notamment à la Réunion.
- Réponse – Les conférences de rédaction sont bien sûr indispensables au bon fonctionnement des éditions. Le confinement a imposé d’adapter le système. Des « préconférences » matinales ont été organisées sur Zoom. Ce mode de fonctionnement n’a pas vocation à être pérennisé. Aujourd’hui les conférences de rédaction sont en cours de reprise dans la plupart des stations.
Peut-on avoir des précisions sur la nomination d’Alexandre Kara au poste de « directeur des contenus politiques », ainsi que cela a été rapporté par Le Figaro puis Le Monde ?
- Réponse – la direction dément de la manière la plus catégorique l’intitulé des nouvelles fonctions d’Alexandre Kara et indique que l’information rapportée par la presse est sans fondement. Il n’y a pas de poste de « directeur des contenus politiques » à France Télévisions.
Peut-on avoir des précisions sur la nomination du rédacteur en chef de Malakoff David Ponchelet au Conseil d’Administration des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF)?
- Cette nomination a été faite dans la transparence la plus parfaite. David Ponchelet a informé en temps en heure la direction de cette nomination et s’est engagé à éviter tout conflit d’intérêt entre cette nouvelle fonction et son travail de rédacteur en chef. Il est de tradition que deux journalistes siègent au Conseil d’Administration des TAAF. Le prédécesseur de David Ponchelet était un journaliste du « Monde ».
Certains syndicats regrettent le manque de journalistes ultramarins et de journalistes femmes au sein de la rédaction de Malakoff et considèrent que ça se ressent dans le traitement de l’actualité. Ils signalent à cet égard l’impasse faite sur les obsèques de George Floyd.
- Réponse – La direction déplore tout d’abord la « violence de cette question », qu’elle considère comme totalement infondée. Elle refuse d’entrer plus avant dans la polémique. « Avec de telles conceptions, cela signifierait qu’il faut être ultramarin pour être légitime à traiter certains sujets et, qu’inversement, certains sujets ne pourraient pas être traités par des journalistes selon qu’ils sont ou non ultramarins« , relève un membre de la direction. En ce qui concerne l’affaire George Floyd, les obsèques n’ont été traitées par aucune station ultramarine car cela n’avait pas de lien direct avec l’actualité Outre-mer. En revanche, l’affaire George Floyd a fait l’objet de très nombreux articles et sujets traités avec des angles ultramarins. Le directeur des Outre-mer a inventoriée de nombreux reportages diffusés
En avril, France 3 Hauts de France a diffusé un article sur la sortie d’un nouveau modèle Toyota. Info ou promo?
- Réponse – Toyota est un acteur majeur de la vie économique du bassin du Valenciennois. Il est d’usage de traiter de la sortie d’un nouveau modèle qui fait partie de l’actualité régionale. Le reportage a respecté les règles déontologiques fixées dans ce genre de cas. Cela étant, c’est vrai que l’angle aurait pu être traité différemment, en intégrant par exemple le point de vue de responsables syndicaux.
Dans quelle mesure un journaliste peut refuser de signer un de ses articles qui a été modifié. Au lieu de modifier, ne vaut-il pas mieux réécrire un nouvel article?
- Réponse – Un article web est souvent évolutif. Il est amendé de manière à préserver la traçabilité. Le journaliste à l’origine de la première version est prévenu. On rajoute une seconde signature. On ne peut pas parler de modification complète de l’angle. Si tel était le cas, le problème de la signature et de la réécriture d’un nouvel article se poserait effectivement. Mais le cas ne s’est en réalité présenté.
Est-il normal que des alternants d’école de communication soient confondus avec des journalistes?
- On n’est pas moins exigeants avec ces alternants venant d’école de communication. Dans le cas que vous évoquez, l’alternant venant de IUT Info Com de Besançon a été accompagné par un journaliste. Cet étudiant se destine lui-même à devenir journaliste. Bien entendu, lors de sa formation, on va en particulier attirer son attention sur la différence fondamentale entre le journalisme et la communication. Aucune formation initiale n’est rédhibitoire pour devenir journaliste. Est-ce à dire dans le cas contraire qu’un étudiant en histoire de l’art ne pourrait être journaliste? Sortir d’une école de Communication n’est pas une marque d’infamie.
Le 24 mai dernier, un reportage du 20 h de France 2 était consacré aux personnes ayant quitté Paris avec l’envie de « vivre ailleurs ». Or il est apparu ultérieurement, sans que cela soit signalé dans le commentaire, que le personnage central du reportage était fondateur d’un site internet traitant de cette thématique. Le commentaire reprenait de surcroît les données de ce site.
- Réponse – Nous avons découvert après coup que cette personne était effectivement partie prenante et animait un site sur la question. On a fait remarquer aux chefs de services que cela posait un vrai problème déontologique. Ils nous ont indiqué qu’ils ne disposaient pas d’un autre interlocuteur pour réaliser le reportage. Nous avons adressé un sérieux rappel à l’ordre aux responsables du service.
Certains journalistes critiquent l’emploi du mot « métropole » dans les commentaires pour désigner l’hexagone, une expression qu’ils jugent « arrogante » vis-à-vis des Territoires ultramarins.
- Réponse – C’est un débat sémantique un rien compliqué, car aucune expression n’est complètement satisfaisante (certains représentants présents à la réunion font valoir que le terme « métropole » est aussi utilisé dans les stations ultramarines). La direction de l’info suggère de « préconiser une recommandation » de privilégier les expressions « France hexagonale » ou « hexagone ».
Des JRI et des photographes indépendants se plaignent de l’utilisation de leurs images récupérées sur les réseaux sociaux. Quelle est notre politique en la matière?
- Réponse – Nous essayons de citer tous les auteurs et de les rétribuer lorsque cela est nécessaire. Il peut arriver que dans l’urgence de la fabrication, nous disposions d’images parfaitement authentifiées et jugées indispensables pour le journal mais dont nous ne parvenons pas à identifier l’auteur avec précision. Ce cas de figure est exceptionnel mais quand ça arrive, nous rétribuons la source après coup. Selon le service juridique il y aurait peu de réclamations de cet ordre. Les quelques contentieux se sont toujours réglés à l’amiable.
Dans les rédactions, certains critiquent l’emploi fréquent du « je » au détriment du « nous » dans les commentaires, notamment des sujets incarnés. Cette dérive ne témoigne-t-elle pas d’une dévaluation du travail du reste de l’équipe de reportage?
- Réponse – L’emploi de la première personne du singulier est parfois nécessaire dans les sujets incarnés. L’implication personnelle du rédacteur est au cœur de la narration. Cela ne date pas d’hier et se pratiquait déjà dans « 5 colonnes à la Une« … Les études démontreraient une attente en ce sens des téléspectateurs, en particulier auprès du jeune public. Mais ce n’est pas une règle d’écriture exclusive. Le « nous » peut-être utilisé dans certains cas. Il n’est pas interdit non plus de montrer toute l’équipe quand c’est possible. Certains le font. Il y a aussi la signature en fin de reportage qui signale le travail de toute l’équipe.
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