SUPPRESSION DE LA PUBLICITE DANS DES PROGRAMMES JEUNESSE : LE SÉNAT SE VEUT RASSURANT

Le Sénat a voté hier soir, contre l’avis du gouvernement, une proposition de loi écologiste prévoyant la suppression de la publicité pendant la diffusion des programmes de France Télévisions pour les enfants.

Une décision qui pourrait se traduire par une nouvelle baisse des recettes publicitaires de 15 millions d’euros, qui s’ajouteraient donc aux 50 millions d’euros de déficit prévus l’année prochaine.

Eric Vial Force Ouvrière & Claude Kern Sénat
Eric Vial, Délégué Syndical Central FO (Force Ouvrière) et Claude Kern, sénateur, membre de la commission culture et communication.

Hier, Force Ouvrière a fait entendre ses inquiétudes et ses questionnements au Sénat par deux fois. Une délégation a été reçue. Une première fois par le sénateur Leleux (dans le cadre d’une audition sur le financement de l’audiovisuel public) et une deuxième fois par le sénateur Claude Kern membre de la commission culture et communication.

En cette nuit de mercredi à jeudi, alors que le texte arrivait au Sénat, la proposition de loi a heureusement fait l’objet de modifications plutôt rassurantes.

L’idée initiale intégrait une mise en place assez rapide, et prévoyait comme contrepartie une augmentation de la taxe sur les publicités du secteur privé, pour compenser les pertes de recettes pour France Télévisions. Les auteurs de la proposition de loi (avec la majorité des sénateurs, toutes étiquettes confondues), ont proposé autre chose : la suppression de cette contrepartie, et un report de la mise en application. Pourquoi ?  Pour que l’entreprise ait « le temps de se retourner », et que le législateur adopte un financement plus pérenne et plus dynamique.

Concrètement, la nouvelle proposition prévoit donc à partir du 1er janvier 2018 la suppression de la publicité commerciale pendant les plages de programmes de la télévision publique destinés aux enfants de moins de douze ans, durant les 15 minutes qui les précèdent et qui les suivent. Cette disposition s’applique également aux sites Internet de la télévision publique.

Pour les parlementaires, l’idée de la suppression de la publicité dans les programmes jeunesse répond à « une exigence d’exemplarité du service public » et à « la protection des plus fragiles ». Catherine Morin-Dessailly, sénatrice, présidente de la commission, et membre du conseil d’administration de France Télévisions a estimé que « le législateur est dans son rôle en voulant préciser dans la loi les lignes à ne plus franchir ».

Pour autant, ce projet « vertueux » de suppression de la publicité pendant les programmes jeunesse ne peut s’envisager que dans un contexte dans lequel les finances du groupe public deviendraient sereines et pérennes. C’est pourquoi des sénateurs se sont dit réceptifs « à l’idée de faire évoluer l’assiette de redevance » (CAP -contribution à l’audiovisuel public) ». Ils proposent même une « contribution forfaitaire universelle » qui permettrait une stabilisation budgétaire, selon eux, de France Télévisions. C’est la ligne que l’on retrouve dans le rapport des sénateurs Gattolin et Leleux publié le 29 septembre dernier.

Cette idée présente beaucoup d’intérêt : non seulement cette évolution permettrait une augmentation de la recette de l’ordre de 150 millions d’euros, mais cette nouvelle assiette élargie, intégrant les nouveaux supports tels ordinateurs et tablettes, garantirait une recette bien plus dynamique, en lien avec la stratégie du développement du global-media engagé par Madame Ernotte Cunci, la nouvelle présidente de France Télévisions.

Force Ouvrière regrette néanmoins que cette nécessité d’un financement à la hauteur ne soit pas clairement mentionnée dans la proposition de loi. FO a réaffirmé,par ailleurs, que « tant que les parlementaires n’auront pas trouvé un financement pérenne pour France Télévisions, un financement à la hauteur des missions et des exigences du service public, l’entreprise sera dans la difficulté d’avoir des stratégies cohérentes à longues échéances » ; cela ne peut que nuire à notre capacité de développement. Nous avons rappelé « qu’au bout du compte lorsque l’Etat veut faire des économies coûte que coûte, c’est toujours sur le dos des salariés que cela se fait ».