Situation de l’Entreprise Unique : Discours de FO France Télévisions à l’intention de Rémy Pflimlin – CCE du 19 février 2013

La fusion de France Télévisions : l’échec d’un concept.

La fusion de France Télévisions s’appuie sur une organisation, un concept, censés faire de l’audiovisuel public français une entreprise leader dans son domaine d’activité.

L’entreprise unique est un vieux rêve. Un vieux rêve de président de chaine ; à commencer par Hervé Bourges qui a mutualisé le service des sports de Antenne 2 et de Fr3 en 1992. Nicolas Sarkozy a réalisé ce rêve de président de chaîne : une entreprise unique de télévision française.

Rémy Pflimlin est le Président Diretceur Général de “l’Entreprise Unique”

Hélas force est de constaté qu’il ne s’agit que d’un rêve et qu’encore aujourd’hui l’entreprise unique n’est pas réaliste. Le constat est même plutôt négatif.

Après deux ans de mises en œuvre, les salariés de France 2, France 3, France 4, France 5, France Ô et Outremers 1ères sont désenchantés, ils ont du tous subir sans broncher avec un grand professionnalisme. Les déménagements, les changements d’organisation, les changements de hiérarchies, les changements d’outils de travail… et quelles est leur récompense ? Pas d’augmentation de salaire, pas de perspective de plan de carrière, une baisse d’activité, une société montrée du doigt pour sa gestion de l’intermittence, une mobilité réduite, la fin du paritarisme, des projets éditoriaux flous… malgré les efforts des salariés qui ont respecté scrupuleusement la marche de l’entreprise, le résultat de l’entreprise unique est bien maigre. Quels sont les bénéfices sur eux, sur le plan social ou sur le plan salarial ?

Le rêve de cette entreprise unique est aussi un échec sur le plan économique. Nos tutelles respectives ne nous ont jamais donné les moyens de réussir ce projet. Pour preuve, la renégociation du Contrat d’Objectifs et de Moyens (COM) revu à la baisse. Evidemment qui va devoir en supporter les conséquences ? De nouveau le budget de la masse salariale, dont les perspectives prévoient la perte d’environ 1000 emplois, voire plus.

Les sempiternelles promesses de la direction, à sa tutelle, d’équilibre financier sont désormais remises aux calendres grecques, car l’Etat pique dans nos caisses. Tant que nous n’aurons pas trouvé un financement pérenne pour l’entreprise unique, cette société sera ingérable. Les incertitudes qui règnent encore sur la redevance, la dotation de l’état et les recettes publicitaires ne permettent pas à France Télévisions de se projeter vers l’avenir et donc de réaliser des projets ambitieux capables de fédérer.

Quant à la culture d’entreprise « d’une entreprise unique », nous pouvons tous constater que c’est également un fiasco. Les divisions entre les salariés et les chaînes du groupe n’ont jamais été aussi grandes. Vous avez dû en avoir conscience car vous avez bouleversé votre comité exécutif en supprimant les patrons de chaînes.

Une équipe très masculine dont la communication de la composition a été assez maladroite, censée redonner une ligne au rêve de l’entreprise unique.

Face aux agressions extérieures, économiques et sociales, il est logique que les salariés se replient sur leur identité ou sur leur culture d’entreprise historique. C’est un réflexe de protection dans une entreprise où ils se sentent menacés, où ils constatent que les postes de techniciens et d’administratifs ne sont plus considérés où ils regrettent que les programmes fabriqués en interne s’amenuisent de grille en grille, pire où aucunes perspectives positives ne se profilent dans leur horizon professionnel.

Monsieur le Président, vous avez ouvert récemment des pistes dans une interview donnée au journal les échos : la régionalisation, les nouvelles missions des chaînes, l’embauche de CDD en longue collaboration. Mais toutes ces promesses font partie d’un plan de route à l’horizon de 2015, qui ne vous engage à rien présentement.

C’est pourquoi, nous vous demandons d’agir vite sur tous les dossiers, afin que vous ne soyez pas l’homme des promesses mais l’homme de l’action et de la cohésion sociale. Le trait de l’addition sera bientôt tiré et il sera l’heure de faire les bilans.

Pour les salariés, aujourd’hui cette entreprise unique est un cauchemar ! Encore un bon mot de syndicaliste, allez vous nous dire.  «Cauchemar, il ne faut pas exagérer », et pourtant comment interpréter le mail envoyé à destination des salariés de la part d’une directrice du siège, travaillant au service des programmes dont la prise de fonction est le 1er juin 2012, sans aucune connaissance de l’entreprise unique et qui demande d’une façon péremptoire le curriculum vitae de chaque salarié et je vous lis le mail mot à mot :

«  Dans le cadre de la NOUVELLE ORGANISATION nous aurions besoin de votre CV pour le faire figurer dans votre dossier » Monsieur le Président, quel intérêt ? Quel but à l’entreprise de savoir si tel ou tel salarié à son certificat d’étude ? Dans un climat social extrêmement perturbé par l’annonce de plus de 800 départs volontaires, en tout cas pour le moment volontaires, est-ce le début des constitutions des  « listes » ? Sur quel ordre cette directrice a-t-elle agit ? Car il est évident que demander un CV à des salariés qui ont dix, vingt ou trente ans d’ancienneté, ne peut-être qu’une simple gaffe. Il y a forcément un objectif sournois. En tout cas, les salariés se sentent humiliés et dévalorisés par de telles demandes. Monsieur le Président, allez-vous accepter encore de tels agissements ?

Monsieur le Président, l’entreprise unique n’est pas la réalité des salariés, c’est le rêve des Présidents.

Lu par Eric Vial, DSC, élu au CCE de France Télévisions.